Pendant une vingtaine d’années, Pierre Kieffer s’est adonné à la peinture dans le calme de son atelier strasbourgeois ou vosgien, une passion longtemps pratiquée à l’écart de son activité professionnelle. Durant cette période, de nombreux tableaux ont été réalisés, de grands ou petits formats, huile sur toile et des acryliques sur Vélin d’Arches. Son activité est marquée par des pauses d’où la réflexion sur la peinture passée, actuelle (Tiepolo, Titien, Delacroix, Manet, Monet, Aleschinsky, Baselitz, Frankenthaler, Kirkeby, De Kooning, Stöhrer, Oehlen …) n’est pas absente. De nouvelles rencontres avec les productions de peintres, des lectures fécondes d’essais de critiques d’art, la visite de nombreuses expositions et foires l’ont amené à renouveler ses approches, et l’année 2023 et le début 2024 tout particulièrement ont été l’occasion d’une abondante activité de création. Chaque création témoigne de la force du trait. Le corps toujours en avance sur les pinceaux, il s’agit chaque fois d’un surgissement, d’une rencontre avec la matière, d’un accident qui fait événement pictural. Les oeuvres se constituent à partir
de formes avec lesquelles il s’amuse et qui l’abusent, un vaste champ qui conduit à une sorte de tension résistante au langage. Des traces fugaces, des chocs, des frôlements tangentiels des formes, des grandes taches ponctuent ses oeuvres où se mêlent des mots. Il se laisse travailler par la couleur. Le trait confond la couleur qui déploie des formes nouvelles retravaillées par de nouveaux gestes. La couleur renouvelle le trait sans faire trait d’union mais
impose d’autres choses prêtes à surgir, qui étaient là en jachère… d’autres couleurs s’en mêlent.